Les embarras du lieutenant

Les embarras du lieutenant Passepoil

Ce matin, le commissaire divisionnaire Fabien du commissariat central de Quimper fut surpris
par un évènement inédit : le lieutenant Albert Passepoil, d’ordinaire totalement effacé, lui
demandait audience ! Comme le lieutenant s’était distingué maintes fois par sa maîtrise
d’Internet qui avait grandement simplifié les actions de ses collègues enquêteurs, le
commissaire exauça sa requête sans désemparer.
- Monsieur le commissaire, commença le lieutenant informatique en bégayant à moitié, je
voudrais vous adresser une pétition extraordinaire tout en vous assurant qu’elle ne se répètera
pas…
- Mais asseyez-vous donc, Passepoil. Que souhaitez-vous me demander ? Vous pouvez
compter sur toute ma bienveillance !
Du bord de sa chaise, le lieutenant se décida enfin.
- Monsieur le commissaire, vous savez… ou plutôt, je suis bête, vous ne savez certainement
pas que je viens de gagner le concours proposé par la revue « Sécurité du Net ». Il s’agissait
de pénétrer un site informatique établi par les rédacteurs de la revue, protégé du mieux qu’ils
savaient. Non seulement j’ai été le premier à casser leurs protections, mais en plus je leur ai
indiqué comment se protéger contre les attaques comme celle que j’avais utilisée. J’ai donc
remporté le premier prix, qui est une croisière de quinze jours en Méditerranée, sur le
Splendide, pour deux personnes. Je viens vous demander de m’accorder des congés pendant la
durée de cette croisière.
Le commissaire n’y voyait aucun inconvénient, tellement Passepoil s’était montré utile par le
passé. Et jugeant que s’aérer un peu ferait le plus grand bien au lieutenant, il jugea même utile
d’en rajouter un peu :
- Mais c’est formidable, Passepoil ! Votre réussite honore notre commissariat et même la
Police nationale toute entière ! Ne vous faites aucun souci pour votre congé, vous serez libéré
avec solde pendant tout le temps que vous demanderez.
Le lieutenant se répandit en remerciements. Il était tellement fier de son succès qu’il réussit
même à vaincre sa timidité et à communiquer la nouvelle à son idole secrète le capitaine Mary
Lester. Mary, qui éprouvait pour lui beaucoup de sympathie et un peu de pitié, le félicita aussi
d’abondance. Forte de son expérience des régates et de la pêche hauturière, elle rassura le
lieutenant, qui n’avait jamais navigué, sur la sécurité et le confort de ces palaces flottants que
sont les bateaux de croisière.
- C’est surtout ma maman qui se fait du souci, avoua le lieutenant, car c’était, bien sûr, sa
maman chez qui il vivait qui allait l’accompagner. Elle a très peur de souffrir du mal de mer
au point de ne pas pouvoir profiter du séjour à bord.
- Cela ne risque pas d'être un problème, Albert. Ces navires sont tellement énormes qu’ils
roulent à peine et ne tanguent pas.
Mary Lester avait eu beau le rassurer, craignant que sa chère maman ne souffrît du mal de
mer, le lieutenant Passepoil se munit de toutes les spécialités, délivrées sans ordonnance,
qu’Internet lui avait indiquées comme efficaces contre ce désagrément. Dramamine, Mercalm,
Nausicalm, Touristil, Vogalib, les patches Scopoderm, sans oublier le Cocculus homéopathique recommandé pour les dames et même, à tout hasard, de la vieille Calmance de l’Abbé Raton, remplissaient une bonne partie de sa valise. Que le principe actif de la plupart de ces produits fût le même, l’antihistaminique dimenhydrinate, ne l’avait pas empêché de se procurer tout l’éventail ; sa maman serait peut-être plus sensible à certains excipients plutôt qu’à d’autres. Pour ranger ses vêtements, madame, peu au courant du climat des océans qu’elle allait traverser et des continents qu’elle allait longer, avait retenu la presque totalité de sa garde-robe. Il avait donc fallu réquisitionner la vieille malle de cabine qui dormait dans le grenier, une véritable armoire sur roulettes qui avait servi au grand-oncle Ernest pour son voyage aux colonies en 1923. L’embarquement se faisait à Montoir, sur le quai d’attache du ferry Saint-Nazaire - Gijón, juste en amont de la ville, au pied du pont. C’est là qu’était amarré le colosse à sept étages, avec piscine, solarium, court de tennis, salon de bal, cabaret, casino et salle multispectacles. La fourgonnette taxi débarqua donc le couple et ses volumineux bagages devant le comptoir de douane où l’on vérifia que les passeports de madame veuve et monsieur Passepoil portaient les visas requis pour les visites en Égypte, Tunisie et Maroc. Alors que madame mère s’avançait pour admirer le rutilant navire tout blanc, les bagages furent pris en charge par un marin dont l’haleine sentait la bière à deux mètres de distance. Jetant un coup d’œil circulaire à la malle, aux valises et à madame, il finit par éructer à l’adresse d’Albert : - Ah, t’es donc le gigolo de la vieille ! Qu’on le prenne pour un gigolo, c’était surprenant, choquant et contraire à l’attitude en société du lieutenant. Seulement, sur le plan physiologique, il faut avouer que c’était flatteur ; Albert Passepoil aurait donc mis ces considérations en balance. Mais que ce malotru mal embouché ose appeler « la vieille » sa chère maman, c’était pire qu’une insulte, c’était une atteinte aux fondations mêmes de l’essence morale du lieutenant. Et encore heureux que sa maman n’ait rien entendu ! S’il avait eu des ergots, il se serait dressé dessus, Albert, seulement il n’était pas de taille à se mesurer à un gars qui soulevait ses 90 kilos comme si c’était un dépliant touristique. Il se contenta donc de mémoriser le nom qui figurait sur le badge porté par l’infâme, se réservant pour plus tard de trouver une punition adéquate. Ayant déposé dans la cabine sa maman, accompagnée de sa malle et des valises des deux, Albert lui confia la tâche délicate du rangement des affaires dans la penderie du bord. Ce qui allait lui octroyer le temps nécessaire pour exécuter le plan A de sa terrible vengeance. Il demanda son chemin et trouva un ascenseur pour le mener au pont supérieur. Albert voulait que rien ne s’oppose à la diffusion des ondes de son smartphone MûreNoire. Il avait laissé ses ordinateurs personnels éteints, car il avait actionné le disjoncteur en quittant son domicile, en sorte à diminuer les risques d’incendie dans l’appartement vide ; mais les ordinateurs de son minuscule bureau au commissariat de Quimper étaient toujours en route, au cas, plutôt improbable, que quelque collège voulût les utiliser. Albert actionna donc à toute vitesse les touches de sa MûreNoire et s’empara du contrôle du PC du commissariat qui lui servait d’instrument fouisseur. Ayant localisé l’ordinateur du croiseur Splendide, la découverte du mot de passe principal ne lui prit que quelques instants : le nom de l’armateur plus la date du lancement du navire était l’une des premières combinaisons naturelles mais peu sécuritaires qu’il essaya! Accéder alors au fichier du rôle de l’équipage fut un jeu d’enfants. Un sourire pas tout à fait diabolique éclaira le visage du lieutenant Passepoil. Il tenait entre ses mains le destin du matelot, mais étant trop bonne pâte, il se contenta d’une punition légère. Il enregistra donc sur le rôle une instruction émanant apparemment du commandant du Splendide : quinze jours de corvée de latrines de l’équipage, ça lui ferait les pieds, à l’ivrogne mal embouché. Et avec le sourire satisfait du chat qui vient de croquer un serin obèse, tout juste échappé de sa cage et innocent des dangers qui l’attendaient au-dehors, le lieutenant Passepoil regagna la cabine qu’il partageait avec sa maman et se prépara à remplir plusieurs cartes mémoire avec les vues qu’il comptait prendre avec son APN pendant le périple. Elles pourraient même mériter d’être postées sur un blog.

Source: http://jean-claude.colrat.pagesperso-orange.fr/Les%20embarras%20du%20lieutenant.pdf

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