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Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2009 au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de
loi de finances pour 2010, ADOPTÉ PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE,
ACTION MISSION INTERMINISTÉRIELLE DE LUTTE
CONTRE LA DROGUE ET LA TOXICOMANIE (MILDT)
( 1 ) C et t e c o m mi s s i o n e s t c o m p o s é e d e : M me M u g u e tt e D in i, p r é s i d e n t e ; M me I s a b el le J a r r au d - Ve rg n o l l e , R a y mo n d e L e T ex ie r , C at h e r in e P ro c acc i a , M . J e an - Ma r i e V an le r en b e r g h e,v i c e- p r és id e n t s ; M M . N i c o l a s A b o u t , F r a n ç o i s A u t a i n , P a u l B l a n c , J e a n - M a r c J u i l h a rd , M me s G i s èl e Pr i n t z , P at r i ci a S ch i ll in g e r, s ec r éta ir es ; M . A l a in V as s el le , r a p p o r t e u r g én ér a l ;M me s J a cq u el in e Alq u i e r, B r i g i tt e B o u t , C l ai r e - Li s e C amp i o n , M M . J e a n - P ie r r e C an te g r i t, B e rn a rd C az ea u , M me M . J ea n D es es s a r d , M me S y l v ie D es ma r e s c au x , M . G u y F is ch e r , M me S a mi a Gh a li , M M . B ru n o G i ll es , J a cq u es Gi ll o t , Ad r ie n G i ra u d , Mme C o l et te Giu d i ce ll i , M M . J e an -P i e rr e Go d ef ro y , A l a i n G o u rn a c , M me s S y l v i e G o y - C h a v e n t , F r a n ço i s e H e n n e ro n , Ma r i e - T h é rè s e H e r ma n g e , G é l it a Ho a rau , M . C l au d e J e an n e ro t, M me C h r is ti an e Ka mme r ma n n , M M . M a r c L a mé n i e, S e r g e L a r c h e r , A n d r é L a r d e u x , D o mi n i q u e L e c l e r c , J a c k y L e M e n n , J e a n - F r a n ço i s M a y e t , A l a i n M i lo n , M me s Is ab el l e P as q u e t , A n n e- M a r ie P a y et , M. Lo u is Pin to n , M me s J an in e R o z ie r , M i ch è le S an V i c en t e -B au d r in , M M . R en é T e u l ad e , F ran ç o i s V en d as i , R e n é V es t ri , A n d r é V i ll i e rs .
Voir les numéros :
Assemblée na tionale (13ème législ.) : 1946 , 1967 à 1974 et T.A. 3 60
Sénat : 1 00 et 101 (ann ex e n ° 27) (2009 -2010 )
S O M M A I R E
AVANT-PROPOS . 5
I. UNE ACTION DÉTERMINÉE FACE À UNE SITUATION QUI DEMEURE
INQUIÉTANTE . 7
A. LA VOLONTÉ DE RESPONSABILISATION DES ACTEURS . 7 1. Une plus grande transparence de l’action de l’Etat contre les drogues . 72. Une politique centrée sur la restauration de l’autorité . 9 B. UNE SITUATION QUI DEMEURE INQUIETANTE . 10 1. Le France se situe dans la moyenne des évolutions européennes . 102. Des risques émergents. 12 II. LE TEMPS DE L’ÉVALUATION. 13
1. La politique de prévention . 132. La prise en charge sanitaire et psychosociale . 14 B. CONSTRUIRE UNE ÉVALUATION SUR LE LONG TERME . 15 1. Choisir le bon indicateur de performance . 152. Les insuffisances d’une évaluation ponctuelle . 16 TRAVAUX DE LA COMMISSION . 19
Mission « Direction de l’action du gouvernement »
Programme 129 « coordination du travail gouvernemental »
Crédits de l’action « Mission interministérielle de lutte
contre la drogue et la toxicomanie » pour 2010
Crédits de paiement
Variation 2010/2009
Action 15 « Mildt»
Observatoirefrançaise des drogues et des dont subventions
Liste des opérateurs
Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) : créée
en 1982, son nom et sa forme actuelle découlent du décret n° 96-350 du 24 avril 1996 et
ses compétences du décret n° 99-808 du 15 septembre 1999.
Observatoire française des drogues et des toxicomanies (OFDT) : créé en 1993 sous
la forme d’un groupement d’intérêt public (Gip). Son objet, défini par sa convention
constitutive modifiée en mai 2007, est le recueil, l’analyse, la synthèse et la diffusion des
données, ainsi que leur amélioration quantitative et qualitative ; le recueil, la diffusion et
la valorisation des connaissances et analyses dans tous les champs disciplinaires
intéressés par les drogues et les toxicomanies ; l’expertise et l’animation de la recherche
dans ces domaines.
Centre interministériel de formation antidrogue (Cifad) : Gip créé en 2003, placé
sous l’autorité de la Mildt et rassemblant les ministères concernés par la lutte contre le
trafic ainsi que le ministère de la santé. Basé à Fort-de-France, il offre des formations de
pointe concernant notamment la surveillance du fret, des passagers, le blanchiment des
capitaux et l’application des conventions internationales destinées aux services répressifs
français en poste dans les départements français d’Amérique et aux personnels des
services répressifs des pays de la zone d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud.
AVANT-PROPOS
Le budget de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) s’établit pour 2010 à 29,8 millions d’euros, en recul
de 7,1 %
par rapport à l’année précédente qui avait été en hausse de 4 % par
rapport à 2008. Ces importantes variations sont la conséquence de deux
mouvements inverses
: l’augmentation puis la baisse des crédits de
fonctionnement de la Mildt, la baisse puis l’augmentation de ses crédits
d’intervention
.
Dépenses de fonctionnement et dépenses d'intervention de la Mildt
Ces variations s’expliquent par le recentrage de la Mildt sur des actions de coordination. Les crédits de fonctionnement ont ainsi été divisés de moitié (7,6 millions d’euros prévus en 2010 contre 15 millions en 2009) du fait du rattachement de la structure aux services du Premier ministre, ce qui a notamment permis 1,6 million d’euros d’économies sur ses frais immobiliers. Cette baisse des crédits de fonctionnement a plus que compensé l’augmentation de 5 millions d’euros des crédits d’intervention (portés de 14,9 millions en 2009 à 19,9 millions en 2010). Ceux-ci dépassent ainsi leur niveau de 2008 (18,8 millions d’euros), conformément aux exigences liées à la mise en œuvre du nouveau plan gouvernemental de lutte contre les drogues et la toxicomanie 2008-2011 approuvé en juillet 2008. Après avoir été chargée de préparer ce plan en concertation avec tous les ministères et administrations concernés1, la Mildt a été chargée du pilotage national pour la mise en œuvre du plan. En conséquence, le projet annuel de performance retient, parmi ses indicateurs, le taux de mise en œuvre des 44 objectifs du plan. Il devrait s’établir fin 2010 à 73 %. Ce plan est, au travers de l’action de la Mildt, l’occasion d’une mise en cohérence de la politique de lutte contre les drogues, qu’elles soient légales ou illégales. Il permet une action déterminée sur le problème des drogues dont la gravité n’a pas décru. Toutefois, la lutte contre les drogues est un travail de long terme qui suppose la définition d’indicateurs pérennes permettant une approche sociale approfondie. Conseil supérieur de l’audiovisuel, ministère de l’éducation nationale, ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, ministère de l’agriculture et de la pêche, ministère de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, ministère de l’intérieur, ministère de la défense, ministère de la justice, ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, ministère du logement et de la ville, Inpes, InVS, institut national des hautes études de sécurité, autres ministères concernés pour l’élaboration d’une stratégie interministérielle. I. UNE ACTION DÉTERMINÉE FACE À UNE SITUATION QUI
DEMEURE INQUIÉTANTE
La nomination d’Etienne Apaire comme président de la Mildt en 2007 a marqué le recentrage de la mission sur sa fonction de coordination, ce qui a logiquement abouti à sa sortie du champ sanitaire et à son rattachement au Premier ministre. L’action résolue de la Mildt s’oriente principalement vers la responsabilisation des acteurs pour permettre une réponse adaptée au problème multiforme et persistant des drogues et toxicomanies. A. LA VOLONTÉ DE RESPONSABILISATION DES ACTEURS
L’action contre les drogues se heurte à la difficulté d’impliquer les différents acteurs, qu’ils soient publics ou privés, individuels ou collectifs. Si tous les acteurs publics sont conscients de la nécessité d’une action, le risque est que les volontés d’intervention se traduisent par des actions dispersées et que certains domaines ne se trouvent pas couverts. Par ailleurs, la drogue étant par nature un problème social, la société civile doit être appelée à participer le plus activement possible à la lutte contre la consommation et les addictions. Ceci suppose de renforcer la prise de conscience des personnes placées en situation de responsabilité, notamment les parents et les chefs d’entreprise, et surtout de les accompagner pour leur permettre de prendre les décisions les plus efficaces même si elles sont parfois difficiles. Dans cette perspective de responsabilisation des acteurs tant publics que privés, le plan gouvernemental doit permettre une plus grande transparence de l’action de l’Etat, tandis que la Mildt consacre désormais une part importante de son action à la restauration de l’autorité comme moyen de lutte contre les pratiques liées aux drogues. 1. Une plus grande transparence de l’action de l’Etat contre les
Les actions des pouvoirs publics contre les drogues sont anciennes mais dispersées. C’est pour mettre fin aux « approches isolées, préjudiciables à l’efficacité et à la lisibilité de l’action publique » que la commission des affaires sociales du Sénat a souhaité la rédaction d’un document de politique transversale relatif à la politique de lutte contre les drogues et les toxicomanies dont le pilotage a été confié à la Mildt. Ce document a été inscrit à l’article 138 de la loi de finances rectificative pour 20081 et remis pour la première fois en annexe au projet de loi de finances pour 2010. 1 Loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008. Au titre de 2010, le document de politique transversale fait apparaître que plus de 932 millions d’euros seront consacrés par le budget de l’Etat à la
lutte contre les drogues et la toxicomanie. A ces crédits s’ajoutent les
284 millions qui, au travers du projet de loi de financement de la sécurité
sociale, permettent l’essentiel de la prise en charge sanitaire, soit un total de
plus de 1,2 milliard. Si l’on considère que les drogues légales (alcool et tabac)
et illégales sont responsables de près de 20 % des décès en France1, un tel
montant n’a rien d’excessif.
Le document fait en outre apparaître plusieurs caractéristiques importantes du budget dédié à la lutte contre les drogues. La première est que
l’essentiel du financement est destiné à des dépenses de prévention et non
de répression comme on le craint parfois. Sur les 932 millions qui relèvent du
budget de l’Etat, on peut distinguer :
- 425 millions relevant des budgets de l’enseignement (dont 238 millions au titre du programme 230 « Vie de l’élève » et 129 millions au titre du programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré ») ; - 52 millions de dépenses « sociales » (programmes 106 « Action en faveur des familles vulnérables », 123 « Conditions de vie outre-mer », 147 « Politique de la ville » et 209 « Sport ») ; - 15 millions au titre du programme 204 « Prévention et sécurité Ces 492 millions d’euros ne représentent pas l’intégralité des sommes destinées à la prévention. En effet, la contribution des budgets de la justice, de la police, de la gendarmerie, des douanes et de la Mildt elle-même représentent un total de 437 millions : une partie est consacrée à la prévention, puisque la police et la gendarmerie participent notamment à la prévention scolaire. Le solde des sommes allouées par le budget de l’Etat, d’environ 3 millions, est constitué par la participation de la France aux organismes internationaux chargés de la lutte contre la drogue et de l’analyse des phénomènes, ainsi qu’à des programmes d’assistance aux pays en développement.
Ces premiers éléments montrent tout l’intérêt de la démarche de regroupement de crédits. Mais d’importants progrès restent à accomplir pour aboutir à une estimation exacte des sommes en cause, ce dont convient la Mildt. Sur les vingt-huit programmes recensés comme participant à la lutte contre les drogues, seuls vingt et un ont été en mesure de flécher la part de leurs crédits qui en relèvent. Les responsables des sept programmes restants2doivent fournir une estimation des crédits concernés pour 2011. Cette mesure 1 Environ 100 000 sur 520 000 décès annuels selon l’observatoire français des drogues et des toxicomanies.
2 107 « Administration pénitentiaire », 111 « Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations de travail », 140 « Enseignement scolaire public du premier degré », 163 « Jeunesse et vie associative », 166 « Justice judiciaire », 231 « Vie étudiante » et 307 « Administration territoriale ».
permettra de promouvoir la bonne gestion des deniers publics, car il est particulièrement inquiétant de constater que les responsables du programme « Jeunesse et vie associative » sont incapables d’identifier la part de leur budget destinée à lutter contre les drogues. Dans les prochaines années, le périmètre des programmes concernés par la politique transversale devra également être revu. L’intérêt premier du document de politique transversale est en fait moins financier que politique. La juxtaposition des sommes consacrées au sein du budget de l’Etat doit permettre une véritable mise en cohérence. C’est donc à un suivi de long terme qu’il faut nous attacher au travers de ce document. 2. Une politique centrée sur la restauration de l’autorité
La politique menée par la Mildt est très clairement orientée, depuis 2007, vers la responsabilisation des individus et la restauration de l’autorité. Dans cet esprit, la prévention des usages de drogues illicites, tout comme celle des abus d’alcool, consiste à « s’efforcer de combiner les principes d’éducation à la santé et à la citoyenneté ainsi que le rappel de l’interdit »1. A cette fin, la Mildt entend promouvoir les mesures légales et réglementaires pouvant avoir un effet dissuasif sur les consommations et elle a financé, en 2009, une grande campagne de communication sur le statut juridique des produits. Il s’agit de rompre avec les pratiques antérieures fondées sur la réduction des risques encourus en termes de santé et de vie sociale, ce qui pouvait aboutir à tolérer certains comportements concernant notamment les drogues douces, voire à en envisager un « bon usage », pour le cannabis par exemple. La Mildt a également souhaité mettre face à leur responsabilité les employeurs et les parents dont elle estime qu’il leur appartient de faire respecter les interdits sociaux. En 2009, elle a organisé deux forums régionaux à Angers, puis à Bordeaux, sur les addictions au travail qui déboucheront, l’an prochain, sur l’organisation d’états généraux. La Mildt estime que 20 % des accidents du travail et de l’absentéisme professionnel sont liés à l’usage de drogues, essentiellement l’alcool et le cannabis. L’usage des drogues dans le monde du travail, trop longtemps négligé, est donc loin d’être anodin en raison de ses effets tant sur les entreprises que sur les personnes elles-mêmes. La Mildt a également commencé à préparer les états généraux de la parentalité prévus pour début 2010. Leur préfiguration a été confiée par la Mildt aux professeurs Marcel Rufo et Philippe Jeammet2. Ce dernier, 1 Réponse au questionnaire budgétaire. 2 Philippe Jeammet avait été auditionné par la commission le 3 juin 2008, préalablement au rapport Sénat n°439 (2007-2008) de Patricia Schillinger, au nom de la commission des affaires sociales, sur la proposition de loi visant à lutter contre les incitations à la recherche d’une maigreur extrême ou à l’anorexie. auditionné, voici deux ans, par votre commission, avait alors déclaré que la priorité de l’action publique devrait être « que la société donne un message clair et mette fin à sa promotion incessante de la destructivité ». Cette volonté de responsabilisation des porteurs d’autorité pour qu’ils exercent leur rôle de prescripteur de comportements s’inscrit dans une tendance européenne analogue en matière de lutte contre les drogues. La Norvège, la Suède et les Pays-Bas ont lancé en ce sens des programmes dont l’évaluation semble plutôt positive. Les mesures mises en œuvre dans ces pays et parfois même en France, comme dans le cadre d’un programme de l’Inpes aux Ulis, prennent essentiellement la forme d’un soutien à la parentalité, au travers d’actions de formation et d’assistance sociale à partir du signalement d’un comportement potentiellement lié à la consommation de stupéfiants chez un enfant. Il ne s’agit en aucun cas d’une nouvelle forme de pénalisation. L’objectif est d’agir en amont de la première consommation de drogue qui s’effectue parfois dès l’âge de dix ou onze ans, la précocité étant le principal indicateur d’une véritable toxicomanie une fois atteint l’âge adulte. B. UNE SITUATION QUI DEMEURE INQUIETANTE
Une action coordonnée et efficace de lutte contre les drogues est d’autant plus nécessaire que la situation de la France demeure inquiétante, tant du fait du contexte européen dans lequel elle s’insère que des risques émergents. 1. Le France se situe dans la moyenne des évolutions européennes
La France se trouve, avec de nombreux autres pays européens, dans une situation paradoxale. Comme en Espagne, en Angleterre et en Italie, qui sont les seuls pays européens ayant un taux de consommation de cannabis plus élevé que le notre, on assiste en France à une baisse du nombre d’utilisateurs. En 2007, 48 % des jeunes de dix-sept ans déclaraient avoir expérimenté le cannabis contre 42 % en 2009, ce taux étant inférieur à celui de 2000. La politique de coopération internationale de lutte contre le trafic de drogue a sur ce point porté ses fruits, puisque les actions menées en commun avec le Maroc ont permis une hausse importante des saisies dans ce pays, ce qui a limité l’arrivée de cannabis. Si la France est passée de la catégorie des pays à forte consommation à celle des pays à consommation moyenne, force est cependant de constater que son taux reste élevé dans l’absolu, ce qui ne témoigne pas d’un véritable retournement de tendance. Cette baisse a en outre pour pendant une augmentation inquiétante de la consommation de stimulants, dont la cocaïne, et un retour de la consommation d’héroïne. Le taux d’expérimentation de cocaïne a ainsi été multiplié par plus de
trois en moins de dix ans : 0,9 % des jeunes de dix-sept ans étaient expérimentateurs de cocaïne en 2000, ils sont 3,3 consommation commence par une initiation généralement autour de l’âge de seize ou dix-sept ans, mais concerne principalement les vingt à trente ans, toutes classes confondues, avec une tendance supérieure à la moyenne chez les chômeurs. Comme toutes les consommations de drogue, celle-ci a des causes multifactorielles. On peut cependant noter qu’il comporte un aspect culturel qui peut s’apparenter à un effet de mode. Les enquêtes conduites par l’OFDT indiquent que la cocaïne jouit depuis quelques années d’une image positive de produit non dangereux et « gérable », susceptible d’apporter une stimulation jugée parfois utile et agréable. Cette évolution des perceptions est particulièrement frappante si l’on en juge par l’augmentation du nombre des fumeurs de cocaïne, ce qui n’est rien d’autre, en réalité, que de consommer du crack. Mais alors que le crack est associé à la marginalité et à la désinsertion, la même pratique, sous un nom différent, bénéficie d’une image positive et se répand. Le risque lié à la cocaïne est sans doute appelé à s’aggraver. En effet, la cocaïne fumée, agissant directement sur le cerveau, est plus addictive, ce qui accentuera les problèmes individuels et sociaux. Le risque d’accident de la route responsable après avoir consommé de la cocaïne est supérieur à celui lié à la consommation de cannabis, qui est lui-même 1,8 fois supérieur à la normale. De plus, la France est entourée de pays - Espagne, Royaume-Uni et Italie - où la consommation de cocaïne est cinq fois supérieure. Une tendance à la contamination des pratiques françaises par les pratiques voisines, déjà observable dans les zones frontalières, pourrait donc considérablement accentuer, dans les prochaines années, le problème de la consommation de cocaïne en France. x La consommation d’héroïne augmente elle aussi. Elle se trouve
associée à la hausse de la consommation de cocaïne car elle est utilisée parallèlement à l’usage de stimulants dans les milieux festifs où la cocaïne a tendance à remplacer l’ecstasy, décrédibilisée par des imitations de mauvaise qualité. On assiste donc à un retour des pratiques d’injection qui posent un véritable problème de santé publique en raison de la diffusion des hépatites C et sans doute également, bien que dans une moindre mesure, du Sida. Le nombre d’overdoses s’accroît lui aussi depuis 2004, alors qu’il avait baissé pendant les dix années précédentes. Cette augmentation particulièrement inquiétante résulte notamment d’un usage de la drogue par une nouvelle génération, qui n’a pas connu les dangers des excès des années quatre-vingt mais aussi, semble-t-il, par des pratiques délibérées de prise de risque. On ne peut donc que constater la persistance du risque lié aux drogues connues, accentuée par l’émergence de nouveaux risques. 2. Des risques émergents
Le premier risque n’est pas nouveau en lui-même, mais n’a été que récemment appréhendé dans toutes ses dimensions. Il s’agit de la polyconsommation de drogues, sur laquelle l’observatoire européen des drogues et toxicomanie (OEDT) a adressé une « question particulière » aux Etats européens en annexe à son rapport annuel 2009 sur l’état du phénomène de la drogue en Europe. La synthèse présentée par l’observatoire européen établit que la polyconsommation est intrinsèquement liée à la toxicomanie puisqu’elle a pour but soit de « maximiser l’expérience psychoactive », soit, au contraire, « de contrebalancer les effets négatifs d’une drogue ». Dans les vingt-deux pays européens ayant participé à l’étude, parmi lesquels figure la France, 20 % des élèves âgés de quinze à seize ans ont à la fois consommé de l’alcool et fumé des cigarettes au cours du mois précédent. En outre 6 % d’entre eux consomment du cannabis en plus de l’alcool et/ou des cigarettes et 1 % utilisent cette association de substances et une drogue illicite supplémentaire (ecstasy, cocaïne, amphétamine, LSD ou héroïne)1. Les usagers de cannabis sont également beaucoup plus susceptibles de consommer d’autres drogues illicites que le reste de la population scolaire du même âge. On note que plus de la moitié des personnes ayant commencé un traitement déclarent avoir un problème avec au moins deux drogues. On distingue trois types de polyconsommateurs : les usagers d’héroïne et de cocaïne, les usagers de cocaïne et de cannabis ou d’alcool et les usagers de cannabis et d’alcool. L’étude relève enfin que la polyconsommation entraîne un risque accru d’overdose en raison de la difficulté à gérer les effets combinés de différents produits. En raison de son importance dans le phénomène addictif, la polyconsommation appelle donc une approche en elle-même, au delà de l’approche ciblée sur chacun des produits consommés. De nouveaux produits apparaissent également sur le marché des produits stupéfiants. On note ainsi une tendance à la consommation de drogues « bio » traditionnelles ou à base de plantes, principalement diffusées au travers de l’Internet. Le contenu extrêmement variable de ces produits ne réduit pas leur danger. Le détournement des médicaments ou produits chimiques appelle aussi une vigilance constante, par exemple le gamma-butyrolactone (GBL), solvant d’usage courant qui se retrouve dans plusieurs produits de grande distribution2. Il faut certes distinguer parmi les pratiques nouvelles ce qui n’est qu’un épiphénomène de ce qui est une tendance justifiant une intervention de l’Etat, mais des mesures d’évaluation rapide et des recommandations doivent pouvoir être obtenues au travers de l’agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (Afssaps) et des agences sanitaires. 1 Résumé – Question particulière « la polyconsommation : modèles et réponses », observatoire européen des drogues et toxicomanies, 2009. 2 Question d’actualité au gouvernement n° 0387G de Marie-Thérèse Hermange, publiée au JO Sénat du 23/10/2009. II. LE TEMPS DE L’ÉVALUATION
Le plan gouvernemental ne peut être efficace qu’à condition d’être pragmatique. Rien ne serait plus préjudiciable en effet que de substituer à une approche fondée sur la réduction des risques, qui peut conduire à une relative tolérance des pratiques, une approche tout aussi - voire plus - dogmatique fondée sur l’interdit. La sélection des meilleures pratiques ne peut donc reposer que sur l’utilisation de tous les instruments disponibles pour lutter contre les drogues et les toxicomanies, qu’ils soient éducatifs, répressifs, sanitaires ou sociaux, cautionnés par une évaluation sur le long terme. A. MENER UNE POLITIQUE PRAGMATIQUE
La restauration de l’autorité ne prend tout son sens qu’en tant que mesure de prévention. Mais, même si elle peut paraître fondamentale, elle ne saurait cependant être la seule approche face à un phénomène aussi socialement complexe que les drogues. Parallèlement, les échecs de la prévention, c’est-à-dire les consommations et toxicomanies, doivent également être prises en charge sous l’angle sanitaire et psychosocial. 1. La politique de prévention
Une politique de prévention efficace doit d’abord cibler les publics les plus fragiles. Des actions spécifiques concernant les femmes enceintes et les détenus sont ainsi développées. Mais les études, tant françaises qu’européennes, montrent qu’une attention particulière doit également être portée au milieu dit « festif ». La consommation de drogues est en effet particulièrement élevée chez les adeptes de la vie nocturne qui cumulent souvent les causes de fragilité. A côté d’un usage récréatif dans des lieux relativement encadrés, se développent des pratiques beaucoup plus porteuses de risques et difficiles à contrôler. Ainsi, le seuil maximum imposé de cinq cents participants aux « rave parties » a éclaté les pratiques festives et les a poussées vers une certaine clandestinité et le choix de localisations transfrontalières. S’y retrouvent des jeunes, parfois marginaux, et donc peu touchés par les campagnes de prévention et de réduction des risques. La consommation de stimulants y est particulièrement importante, avec un retour de pratiques quasiment disparues, comme l’injection de cocaïne, qui tend à remplacer la consommation d’ecstasy, décrédibilisée par le trafic de produits d’imitation. La part des jeunes femmes toxicomanes dans les milieux festifs est nettement supérieure à la moyenne, spécialement pour ce qui concerne la consommation d’amphétamines1. Comme on l’a vu, la consommation 1 Source OEDT, rapport précité. d’héroïne se développe elle aussi dans ces milieux, dans le cadre d’une polyconsommation destinée à compenser l’effet des stimulants. L’action sur les publics les plus fragiles doit s’accompagner d’une action sur les vecteurs et les adjuvants que sont le tabac et l’alcool. La consommation de cannabis est en France particulièrement associée au tabac qui est adjoint à la résine pour en permettre la consommation sous forme de « joints ». Tel n’est pas le cas aux Etats-Unis où la marijuana est fumée directement, sans tabac. La pratique française de consommation simultanée est tellement répandue que l’OFDT constate le développement de dépendances au tabac qui ont pour origine l’usage régulier de cannabis. Concernant l’alcool, les conclusions de la synthèse conduite par l’OEDT sur les pratiques européennes de polyconsommation sont particulièrement claires : « L’alcool est présent dans presque tous les modèles de polyconsommation. C’est généralement le premier produit entraînant d’importants effets psychoactifs et de modifications d’état de conscience utilisé par les jeunes gens; sa grande disponibilité en fait la drogue élémentaire des combinaisons de substances chez les jeunes adultes, particulièrement dans les milieux récréatifs, ainsi que chez les usagers de drogues intensifs, dépendants et sevrés. Les conclusions de ce rapport soulignent la nécessité de renforcer les interventions ciblant l’alcool et la consommation d’alcool, tant au niveau du marché que sur le plan des normes sociales. » Les mesures d’interdiction de vente d’alcool aux mineurs et de vente au forfait, adoptées dans le cadre de la loi HPST1, vont dans le sens d’une plus grande responsabilisation des producteurs et des distributeurs, mais l’effort en faveur de la modération doit être poursuivi. 2. La prise en charge sanitaire et psychosociale
La prévention, même ciblée à la fois sur les publics et sur les produits, ne suffit malheureusement pas à empêcher l’usage et les addictions. La réponse sociale, et plus précisément les modalités de prise en charge, doivent donc être développées de manière cohérente si l’on veut espérer réduire le nombre de toxicomanes. Comme l’a indiqué le président de la Mildt à votre rapporteur, la pénalisation n’est pas en elle-même une bonne réponse au problème de la drogue. Les peines risquent en effet d’être trop faibles (comme le rappel à la loi) ou trop fortes (la prison) pour pouvoir réellement agir sur l’addiction dont souffre une personne condamnée. Une perspective pourrait être la contraventionnalisation de l’usage qui éviterait de faire intervenir le juge et aurait un effet dissuasif lié à l’amende infligée. Des peines alternatives à la prison peuvent également être envisagées pour les délits liés aux drogues, notamment l’obligation de stages sur les effets des drogues et sur les 1 Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relatives aux patients, à la santé et aux territoires. addictions, suivis aux frais du condamné. Il s’agit là de mesures raisonnables qui permettraient une véritable pénalisation sans tomber dans les excès de l’incarcération.
La prise en charge sanitaire offre aujourd’hui des perspectives particulièrement intéressantes puisque les fondements chimiques, biologiques et neurologiques des addictions sont de mieux en mieux compris. Des traitements médicaux sont aujourd’hui susceptibles d’accompagner le sevrage plutôt que d’offrir une simple alternative médicalisée à l’usage des drogues illicites. Une étude récente publiée dans la revue The Lancet a ainsi permis de mesurer l’intérêt du baclofène pour diminuer l’état de manque chez les patients atteints de cirrhose alcoolique1. Par ailleurs, l’OEDT souligne l’importance d’une étude italo-espagnole multisite sur l’efficacité du vaccin anticocaïne TA-CD. Il s’agit de l’essai de plus grande ampleur mené sur ce vaccin à ce jour, avec plusieurs centaines de volontaires. Les premières études de sécurité de ce vaccin aux Etats-Unis ont fait état d’une réduction des effets subjectifs de la cocaïne et de la consommation de la drogue, ainsi que d’un meilleur suivi du traitement. Ces perspectives thérapeutiques doivent s’insérer dans le cadre d’une prise en charge psychosociale plus large. Il serait intéressant, de ce point de vue, que soit menée une évaluation de l’efficacité des consultations dédiées aux jeunes qui, si elles fonctionnent de manière convaincante, pourraient servir de modèle pour d’autres publics fragiles. La question essentielle reste bien sûr celle de la détection et de l’orientation, pour lesquelles l’information et la formation des parents, des professeurs et des employeurs sont déterminantes.
B. CONSTRUIRE UNE ÉVALUATION SUR LE LONG TERME
Face à la complexité du phénomène des drogues, l’évaluation des mesures prises mais aussi, plus généralement, des politiques menées, doit être la plus approfondie possible. Ceci suppose de choisir le bon indicateur de performance et de mener des évaluations sur le long terme. 1. Choisir le bon indicateur de performance
Les drogues sont porteuses d’un double risque, individuel et social. Aux problèmes de santé et de désocialisation que rencontre un usager de drogue, s’ajoute le trouble qu’il fait subir à son entourage, voire à l’ordre public. Il convient cependant de se défier des approches trop simples et des indicateurs uniques. La sinistralité routière offre ainsi la possibilité d’une 1 « Effectiveness and safety of baclofen for maintenance of alcohol abstinence in alcohol-dependent patients with liver cirrhosis randomised, double-blind controlled study Addolorato G, Leggio L, Ferrulli A, Cardone S, Vonghia L, Mirijello A, Abenavoli L, D’Angelo C, Caputo F, Zambon A, Haber PS, Gasbarrini G, Lancet. 2007 Dec 8 ; 370 (9603) : 1915-22 dont une analyse figure sur le site www.infodoc.inserm.fr. mesure simple et rigoureuse des effets des comportements à risque. Elle aboutit cependant à centrer l’attention des pouvoirs publics sur le seul conducteur au détriment d’une politique adressée à tous. Ce n’est pas parce que le conducteur ne boit, ni ne consomme de substances illicites que ses passagers doivent se sentir libres de le faire. L’action des préfectures, et plus particulièrement des chefs de projets départementaux « Toxicomanie », qui sont généralement les sous-préfets exerçant la fonction de directeur de cabinet, doit être revue pour éviter tout prisme statistique qui aboutirait à négliger des parts importantes de populations à risque. Il en est de même pour l’objectif de réduction du nombre d’usagers de drogue. Le but est évidemment d’agir sur les causes de la consommation mais, ici encore, les mesures prises doivent être adaptées à la complexité du phénomène. Nous avons pu noter le caractère cyclique de la consommation de drogue et le retour de pratiques dangereuses redécouvertes par de nouveaux usagers peu conscients des risques. Les efforts doivent donc agir sur le tissu social lui-même pour éviter que les générations d’usagers se succèdent. Ceci suppose d’évaluer l’image des drogues, les conditions de leur utilisation et l’évolution des tendances. 2. Les insuffisances d’une évaluation ponctuelle
Le plan gouvernemental de lutte contre les drogues comporte cent quatre-vingt-treize mesures réunies en quarante-quatre objectifs. Cette profusion est nécessaire pour prendre en compte l’ensemble des aspects du problème et il appartient déjà la Mildt d’assurer la cohérence de l’ensemble. Demeure cependant le risque que le plan se réduise à un simple catalogue si une évaluation approfondie n’est pas menée. Une vision d’ensemble est nécessaire. Or, l’objectif assigné à la Mildt par le projet annuel de performance est uniquement lié à la prise de mesures : le Parlement est ainsi informé, chaque année, du nombre de mesures prises, ce qui nous indique qu’en 2010, le plan sera normalement réalisé presque aux deux tiers. Il convient cependant d’être modeste et réaliste sur l’efficacité de ce plan. Quand bien même le nombre d’usagers aurait baissé en 2011, année d’achèvement du plan gouvernemental, on ne pourra être sûr qu’il s’agit là de la conséquence des mesures prises depuis 2008. Trois ans ne peuvent suffire à inverser une tendance inquiétante. Il faut donc une évaluation de fond, inscrite dans la durée, afin de saisir les tendances sociales en matière de consommation de drogues et, surtout, leurs déterminants. Obliger à respecter la loi est nécessaire, mais il est important aussi de savoir pourquoi elle ne s’impose pas d’elle-même. Ce devrait être le travail de l’OFDT qui a mené l’évaluation du plan 1999-2002 mais n’a plus été sollicité depuis. Il apparaît en fait que les évaluations conduites entre deux plans sont insuffisantes face à l’ampleur du phénomène des drogues. Une véritable théorie de l’action publique doit être développée et reposer sur des indicateurs intermédiaires plutôt que sur un indicateur final unique. La détermination des indicateurs sociaux permettant de mesurer de manière pérenne l’efficacité de la politique publique devrait donc être confiée à l’observatoire et donner lieu à une publication annuelle. Nous disposons à l’heure actuelle d’un indicateur budgétaire se résumant au nombre de mesures prises, fourni par la Mildt, et d’une description précise de la situation des drogues en France, présentée par l’OFDT, mais sans lien avec l’efficacité potentielle de la législation. Si la France souhaite réellement s’engager dans une politique de lutte efficace contre les drogues, ce sont des instruments de synthèse et d’évaluation qui doivent être mis en place. Si cette approche s’avère fructueuse, elle ne manquera pas de se développer dans le reste de l’Europe.
Au vu des observations formulées dans le présent avis, votre
commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la
mission « Direction de l’action du gouvernement » pour l’année 2010 pour
ce qui concerne l’action « Mission interministérielle de lutte contre la
drogue et la toxicomanie ».

TRAVAUX DE LA COMMISSION
Réunie le mercredi 18 novembre 2009, sous la présidence de Muguette
Dini, présidente, la commission examiné le rapport pour avis de Gilbert Barbier
sur le projet de loi de finances pour 2010 (action « Mission interministérielle de
lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) » du programme « Coordination
du travail gouvernemental

Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a rappelé que, depuis l’année
dernière, les crédits de la Mildt constituent une action rattachée à la mission « Direction de l’action du Gouvernement budgétaire reflétant le recentrage opéré par cet organisme sur sa fonction de coordination. En effet, avec un budget qui, en 2010, s’établira à 29,8 millions d’euros de crédits, la Mildt elle-même ne s’occupe directement que d’une infime partie de la lutte contre la drogue et la toxicomanie. Elle est cependant au cœur de cette politique. Rattachée au Premier ministre, elle a été chargée d’élaborer le plan gouvernemental 2008-2011 et elle en assure le pilotage national. Dans ce cadre, elle a élaboré, pour la première fois cette année et à la demande de la commission des affaires sociales, un document de politique transversale selon lequel le montant cumulé dédié à la lutte contre les drogues dans le budget de l’Etat s’élève à près de 932 millions d’euros. Ajoutés aux 267 millions consacrés à la prise en charge sanitaire des personnes, définie par la loi de financement de la sécurité sociale, ces crédits constituent une enveloppe totale de près de 1,2 milliard destinée, l’année prochaine, à lutter contre les drogues et la toxicomanie. Cette somme ne paraît pas disproportionnée au regard de l’impact des drogues sur la santé publique : on estime que 20 % des décès en France chaque année leur sont attribuables. La part de financement consacrée à l’éducation et à la prise en charge sociale et sanitaire des personnes absorbe plus de la moitié du budget total, et dépasse donc celle se rapportant à la répression, l’essentiel relevant du budget de l’éducation nationale et de celui de l’enseignement supérieur et de la recherche, ce qui paraît légitime pour lutter contre la consommation précoce de substances addictives qui s’effectue parfois dès l’âge de dix ou onze ans. La politique française de lutte contre les drogues est donc clairement du côté de la prévention. De nombreux cloisonnements demeurent néanmoins, qui nuisent à l’efficacité de la politique menée. Ainsi, l’action de l’éducation nationale est encore trop peu coordonnée avec celle des autres acteurs du système. Plus généralement, la Mildt s’est nettement orientée, depuis la prise de fonction de son actuel président, vers une politique de responsabilisation des individus et de restauration de l’autorité. La campagne de communication menée en 2009 sur le statut juridique des substances avait ainsi clairement pour but de rompre avec les pratiques antérieures fondées sur la réduction des risques, ce qui pouvait aboutir à tolérer certains comportements concernant les drogues dites « douces », voire à envisager un « bon usage » du cannabis par exemple. La Mildt a également souhaité mettre face à leurs responsabilités les employeurs et les parents auxquels elle estime qu’il appartient de faire respecter les interdits sociaux. En 2009, elle a organisé deux forums régionaux sur les addictions au travail qui déboucheront, l’an prochain, sur l’organisation d’états généraux ; elle a aussi commencé à préparer les états généraux de la parentalité prévus pour début 2010. La préfiguration de ceux-ci a été confiée par la Mildt au professeur Philippe Jeammet, que la commission des affaires sociales avait précédemment auditionné et qui avait à l’époque affirmé la nécessité « que la société donne un message clair et mette fin à sa promotion incessante de la destructivité ». Cette volonté de responsabilisation des porteurs d’autorité pour qu’ils exercent leur rôle de prescripteur de comportements s’inscrit dans une tendance européenne analogue en matière de lutte contre les drogues : la Norvège, la Suède et les Pays-Bas ont lancé, à ce titre, des programmes dont l’évaluation semble plutôt positive. Plus globalement, la question fondamentale est celle de l’évaluation de l’action publique. Or, avec 193 mesures regroupées en 44 objectifs, le plan gouvernemental 2008-2011 risque fort de devenir un simple catalogue dont l’efficacité ne pourra réellement être mesurée à court terme ; d’où la nécessité d’une évaluation de fond, inscrite dans la durée, afin de saisir les tendances sociales en matière de consommation de drogues et, surtout, leurs déterminants. Obliger à respecter la loi est nécessaire, mais il est important aussi de savoir pourquoi elle ne s’impose pas d’elle-même. Ce devrait être le travail de l’observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) qui a mené l’évaluation du plan 1999-2002, mais n’a plus été sollicité depuis lors. La détermination des indicateurs permettant de mesurer l’efficacité de la politique publique devrait lui être confiée et donner lieu à une publication annuelle. On ne dispose à l’heure actuelle que d’un indicateur budgétaire se résumant au nombre de mesures prises, fourni par la Mildt, et d’une description précise de la situation des drogues en France, présentée par l’OFDT, mais sans lien avec l’efficacité potentielle de la législation. Sous réserve de ces réflexions, Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a
proposé de donner un avis favorable au budget attribué pour 2010 à la Mildt. Muguette Dini, présidente, a déclaré que le sujet de ce rapport suscite
légitimement, chaque année, de nombreuses questions sur l’évolution des pratiques addictives. Alain Vasselle a souhaité connaître l’évolution des crédits alloués par
l’assurance maladie à la lutte contre les drogues et la toxicomanie et s’est interrogé sur la pertinence d’un tel financement. Il n’y a certes pas de taxation possible des substances illicites mais on pourrait imaginer de ne faire financer qu’une petite partie de la prise en charge par les régimes de base et de faire supporter la majeure partie des coûts par des assurances complémentaires ou - pourquoi pas ? - par la personne consommatrice elle-même et sa famille. Après avoir estimé qu’avec 193 mesures, le plan gouvernemental s’apparente à un inventaire à la Prévert, André Lardeux a souhaité connaître les
mesures spécifiques relatives à la lutte contre le phénomène d’alcoolisation
massive des jeunes.

Guy Fischer a critiqué l’orientation prise par la Mildt depuis 2007 vers
le renforcement des sanctions et la responsabilisation des parents. Il faut prendre en compte l’évolution des conduites addictives qui touchent les enfants de plus en plus jeunes, spécialement au sein des populations défavorisées, même si la drogue touche tous les milieux. Or, un « plan catalogue » comme le plan gouvernemental 2008-2011 permet malheureusement de ne pas se poser la question des moyens financiers et humains nécessaires à la prévention. La répression ne peut être une solution. Annie David a insisté sur la nécessité de contrôler les résultats des
mesures du plan. On ne peut se contenter de vouloir mettre les parents face à leurs responsabilités alors que l’on ne s’attaque pas aux réseaux de distribution de drogues qui vont chercher les enfants à la sortie du collège. C’est dans ce domaine qu’on doit dénoncer le manque de volonté répressive. Il faut ensuite donner les moyens aux parents de réagir quand ils savent que leur enfant est confronté à ce problème, encore qu’ils ne soient pas toujours en mesure d’en être informés. Elle a manifesté son plein accord avec les propos du professeur Jeammet sur le caractère destructeur de la société actuelle, surtout sous l’angle du capitalisme libéral qui fait l’apologie du paraître et de la consommation à outrance. Donner aux jeunes une autre image de la réussite que celle véhiculée par la publicité, par exemple, pourrait faire évoluer les choses plus favorablement. Enfin, il ne faut pas négliger non plus l’impact des drogues sur les salariés. Adrien Giraud a considéré qu’une part importante de la responsabilité
en matière de drogue incombe à l’Etat qui, pendant longtemps, a détenu le monopole sur la vente de tabac et qui perçoit des taxes importantes sur ce produit et sur l’alcool. La consommation des drogues légales n’est souvent que la première étape vers l’abus de substances illicites. Alain Milon a jugé que le recentrage de la Mildt sur son action de
coordination est une bonne chose. Il a confirmé l’analyse d’Annie David selon laquelle les réseaux de distribution ne sont pas suffisamment réprimés. En tant qu’élu local, il a constaté que les services de l’Etat semblent ne pas vouloir s’attaquer aux différents réseaux pour garantir la paix sociale. Alain Gournac s’est indigné du laxisme concernant les pratiques
d’alcoolisation massive dans les grandes écoles et les universités, parfois avec la neutralité bienveillante des autorités. En appeler à la responsabilité parentale est en l’espèce insuffisant car ce phénomène concerne plutôt de jeunes adultes. Il a enfin suggéré que la politique de lutte contre les drogues soit financée grâce à l’argent des saisies. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a précisé qu’un fonds existe déjà
Anne-Marie Payet a considéré que vouloir restaurer l’autorité
parentale relève du vœu pieu puisque des parents rencontrent désormais des problèmes d’autorité vis-à-vis de leurs enfants dès le plus jeune âge. Françoise Henneron a confirmé ce phénomène inquiétant et a fait part
de son expérience sur la difficulté de mobiliser les parents sur le problème des drogues. Muguette Dini, présidente, a estimé que les parents sont d’autant plus
difficiles à mobiliser sur ce point qu’ils ne pensent pas être concernés un jour. Yves Daudigny a déclaré que la situation décrite fait froid dans le dos.
La drogue concerne tous les milieux sociaux et les réseaux de distribution fonctionnent de manière visible. Il est nécessaire de faire de la lutte contre les drogues une grande cause nationale. Muguette Dini, présidente, a signalé les conséquences désastreuses de
la consommation de drogue sur longue période pour les futures mères : on observe, pour ce motif, la naissance de plus en plus fréquente d’enfants handicapés, les statistiques prouvant qu’elles ont été multipliées par 2,5 en dix ans. A leur tour, Alain Vasselle et André Lardeux ont tous deux insisté sur
la nécessité de lutter contre les réseaux de distribution qui touchent les zones tant urbaines que rurales. En réponse, Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a signalé que les
forces de police estiment souvent que s’en prendre à la distribution finale ne résout pas le problème de la dissémination des drogues. L’arsenal répressif demeure trop caricatural avec un simple rappel à la loi pour les mineurs ou des procédures judiciaires longues et compliquées aboutissant à des sanctions peu efficaces. Il paraît préférable de s’engager dans une politique contraventionnelle. Il est légitime que l’assurance maladie contribue à la prise en charge sanitaire des usagers de drogues étant donné l’enjeu de santé publique que ce problème présente. On ne peut distinguer les actions contre les drogues et le traitement des addictions, c’est pourquoi la Mildt essaie de conduire des actions dans les deux directions. L’alcoolisation massive est un phénomène d’autant plus inquiétant que les usagers de drogues en consomment en général plusieurs, dont l’alcool. Les mesures prises dans le cadre de la loi HPST sur l’interdiction de la vente d’alcool aux mineurs et des « open-bars » devraient permettre de rendre la position de l’Etat plus claire et de renforcer son engagement dans la lutte contre les addictions. Les orientations de la Mildt ne sont pas purement répressives mais rompent avec un certain laxisme. Il faut trouver des sanctions intermédiaires et mener des évaluations qualitatives et sociales, et non uniquement financières, des mesures prises pour atteindre les racines du mal. L’idée de déclarer la lutte contre les drogues « grande cause nationale » paraît d’autant plus pertinente que la situation demeure inquiétante, la baisse de la consommation de cannabis s’accompagnant d’une augmentation de la consommation de cocaïne. Puis la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de
l’action «
Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la
toxicomanie » pour 2010.

Source: http://www.senat.fr/rap/a09-103-5/a09-103-51.pdf

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